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Seul le véritable amour commande les désirs. Ils sont donc l'expression d'un amour équilibré et libre, l'amour de la charité, le seul capable d'impliquer la personne tout entière.

par G. Cucci

Sur le thème du désir, une vision spirituelle reste indispensable car elle montre que l'action n'est pas le fruit du hasard, mais nécessite un plan, et qu'en effet les difficultés et les imprévus de la vie sont précieux et portent en eux un enseignement qu'il faut recueillir. car montrer un chemin possible à reconnaître. La fatigue, la souffrance et les épreuves ne disent pas en soi qu'il est inutile de désirer, mais que tout a un prix, et qu'il est important de savoir dans quoi investir sa vie. Des événements imprévus ont souvent aidé les saints à clarifier et à concrétiser leurs projets ; s. Ignace vient donner vie à un nouvel ordre suite à des revers qui ne lui permettent pas de réaliser son désir : vivre définitivement en Terre Sainte. La flexibilité avec laquelle il traite ces obstacles est remarquable ; avec humilité il remet en question son projet et décide de se mettre à la disposition du Pape. Celui qui sait écouter la voix de l'Esprit reconnaît que les grandes choses de la vie naissent souvent d'événements inattendus ou aléatoires qui pèsent pourtant sur la profondeur du désir.
L'atrophie du désir n'épargne même pas la vie spirituelle. Elle aussi est en effet traversée par la tentation de l'alternative : mieux vaut une vie ennuyeuse, ennuyeuse mais à l'abri des risques, sûre, calme et ordonnée, qu'une vie lumineuse, colorée mais effrayante, car on ne sait pas où elle se trouve. dirige, et dont les règles et les valeurs pourraient tôt ou tard s'effondrer ou perdre leur crédibilité. L'abbé A. Louf reconnaît que ce malaise a profondément affecté la vie spirituelle : « Les traités classiques de morale ou d'ascètes et de mysticisme abordaient le problème de manière nécessairement abstraite. 
Désirs, tentations, tendances étaient décrits, classés. On a tenté de les réglementer dans le cadre de prescriptions et d'interdictions, parfois également « tarifées » en fonction de leur gravité, parfois aussi appelée « perversité ». Les cas réels étaient rarement traités, ce qui aurait été très complexe et peu pratique. Jusqu'à une époque très récente, les parties des traités de morale considérées comme les plus délicates étaient écrites uniquement en latin, de sorte que les mots du quotidien étaient considérés comme absolument inappropriés pour décrire certains faits.
Ces objections ne conduisent cependant pas à conclure que le désir et la vie spirituelle sont inconciliables, mais que l'intelligence est également nécessaire dans ce domaine fondamental de la vie : le désir, comme toute autre réalité, se présente de manière ambiguë, il peut certainement conduire au mal mais, comme nous l'avons vu dans les articles précédents, il se présente à l'origine comme un désir de bien. Nier le désir ne garantit pas contre le préjudice, car la peur et le déni finissent par renforcer plutôt qu’atténuer ces dynamiques. 
Il s'agit plutôt d'apprendre à lire le désir, à déchiffrer la signification symbolique qui le caractérise : « Si les désirs se présentent parfois sous des formes un peu étranges ou conduisent à des comportements qui ont clairement un lien avec ce qu'on appelle le péché, c'est simplement parce qu'ils ne sont pas bien « en ordre », c'est parce qu'ils sont « mal ordonnés » (dirait Bernard). Or, l’ensemble des désirs ne peut être ordonné et mis en place – on pourrait aussi dire : « structuré » – que par l’amour. Seul le véritable amour commande les désirs. 
Et, si la majorité des gens, pour ne pas dire la quasi-totalité, souffrent de désirs qu'ils considèrent comme « désordonnés », c'est parce que nous sommes des êtres plus ou moins blessés, handicapés par l'amour » (Louf).
Bien sûr, il n'est pas facile de connaître la vérité de ses désirs, car le désir fait appel à la réalité profonde et au mystère que nous sommes, avant tout à nous-mêmes. Connaître son désir est pourtant le premier pas pour le vivre en liberté : plutôt que de l'approuver ou de le condamner, il s'agit de découvrir la vérité sur lui, de l'éduquer et de reconnaître son enseignement pour la vie. 
En effet, chaque activité a un plaisir qui lui est proportionné, et lorsqu'elle est réalisée de manière ordonnée elle apporte du plaisir : il peut s'agir d'une activité manuelle, d'études, d'un sport, d'une relation... Le désir, lorsqu'il trouve une expression adéquate , manifeste ce que saint Augustin appelait « ordo amoris », dont la caractéristique est la circularité, c'est-à-dire être cause et effet de l'amour : la purification du désir devient énergie et connaissance suscitées par l'amour et celles-ci permettent à leur tour d'ordonner l'amour, d'aimer. l'objet proportionnellement à son importance. C'est l'expression d'un amour équilibré et libre, l'amour de la charité, le seul capable d'impliquer la personne tout entière.